DSP2 est un acronyme qui a fait son chemin ces derniers temps. La directive va révolutionner le monde du paiement électronique et changer la façon dont nous interagissons avec les institutions bancaires traditionnelles. Mais qu’est-ce que la DSP2 exactement ? Pourquoi a-t-elle une quelconque importance pour le secteur des assurances ?

Abordons une question à la fois, en commençant par la première. DSP2 est l’acronyme de la deuxième directive sur les services de paiement de l’Union Européen. Adoptée en 2015, elle devrait entrer pleinement en vigueur le 31 décembre 2020. Parmi ses principaux impacts, un changement dans la façon dont les données de transaction seront traitées, nécessitant une authentification forte pour la plupart des transactions en ligne.

Des données de transaction pour tous

Bien sûr, les données de transaction ne seront pas accessibles à tous. Mais les banques vont de fait perdre leur monopole sur les données de transaction. En effet, la DSP2 donnera accès aux données de transaction à deux groupes principaux d’acteurs.

Le premier groupe sont les AISP – les Account Information Service Providers. Un AISP est une société qui peut accéder aux données du compte d’un client avec son consentement. Par exemple, les outils de gestion financière personnelle (Linxo) ou les applications de crédit personnel (Credit Kudos).

Le deuxième groupe est celui les PISP – les Payment Initiation Service Providers. Un PISP est une société qui peut non seulement accéder aux informations sur le compte du client, mais aussi initier une transaction. Ces sociétés sont des intermédiaires entre la banque des clients et des commerçants – par exemple, les portefeuilles électroniques (PayPal), les applications de virements électroniques (Lydia).

En ce qui concerne les compagnies d’assurance, elles peuvent avoir accès aux données des transactions, lorsqu’elles agissent en tant que AISP. Par exemple, une compagnie d’assurance peut offrir à ses clients une application de gestion des finances personnelles. Avec cette application elle peut ainsi recueillir l’historique des transactions des clients qui ont donné leur consentement au partage de leurs données.

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Quels sont les avantages de l’accès aux données ?

Pourquoi les compagnies d’assurance auraient-elles besoin de ces données ? Depuis l’apparition du Big Data, les compagnies d’assurance ont déjà investi 2,4 milliards de dollars dans le Big Data en 2019, et ce chiffre devrait passer à 3,6 milliards en 2021. Les données des transactions, et nous parlons ici de l’ensemble de l’historique des transactions, peuvent donner beaucoup d’indications sur le comportement des clients. Ainsi, pour les compagnies d’assurance, ce type de données peut offrir beaucoup de nouvelles possibilités.

Les données des transactions d’un client peuvent aider la compagnie d’assurance à mieux évaluer les risques d’un éventuel sinistre pour le client et à ajuster en conséquence la tarification de la police.

Prenons l’exemple suivant : une compagnie d’assurance voit que son client a acheté un abonnement annuel à une salle de sport. Cela signifie que leur client a moins de chances de tomber malade, et donc que le risque de recours à l’assurance maladie est plus faible. Sachant cela, une compagnie d’assurance peut proposer des contrats à prix plus compétitifs en santé ou en assurance vie.

Un autre cas d’utilisation des données de transaction est plus simple. Une compagnie d’assurance peut simplement proposer des produits d’assurance sur les biens que son client vient d’acheter.

Par exemple, un client a acheté une nouvelle voiture, et sa compagnie d’assurance le déduit à partir des données de ses transactions. Une entreprise peut alors immédiatement proposer une assurance automobile à son client.

En outre, si ces données peuvent être combinées avec d’autres données qu’une compagnie d’assurance obtient sur un client, cette offre d’assurance automobile peut même devenir plus personnalisée.

Vous pouvez imaginer un cas, où une compagnie d’assurance voit une transaction pour une voiture chère. Elle la combine ensuite avec les photos publiques sur les réseaux sociaux du client où il pose près d’une Tesla, et peut alors proposer une assurance spéciale pour une voiture électrique.

Une position privilégiée pour les Assurtech

Il est désormais clair que la DSP2 va permettre aux compagnies d’assurance d’accéder à davantage de données sur leurs clients. Il ne serait pas surprenant que les entreprises les plus innovantes en tirent le plus grand profit.

Les Assurtechs se sont développées ces dernières années, principalement grâce à leur utilisation du Big Data. La DSP2 leur permettra à accéder les données relatives aux transactions de leurs clients, en offrant davantage de possibilités de vendre des produits d’assurance à leurs clients.

Focus sur l’assurance à la demande

Examinons de plus près un segment particulier d’Assurtech – les entreprises de micro-assurance ou des assurances à la demande (Lovys). Les experts affirment déjà que ce secteur sera l’avenir de l’assurance automobile. Avec la DSP2, ces entreprises pourraient tirer des bénéfices particulièrement élevés de l’exploitation des données des transactions.

Mais pourquoi seront-elles les mieux placés pour le faire ? Ces compagnies proposent des assurances à court terme, par exemple pour un voyage le temps d’un week-end. Elles seront donc en mesure de proposer une assurance immédiatement après avoir constaté, à partir des données relatives aux transactions, que leur client a réservé un tel voyage.

Comme leur offre est beaucoup plus personnalisés que celle des compagnies d’assurance traditionnelles et qu’elles sont souvent plus compétitives en termes de prix, elles pourraient être en mesure de vendre davantage de produits de cette manière.

Comment cela va changer le marché de l’assurance ?

Cet avantage concurrentiel des Assurtechs les aidera à accroître leur part de marché. On prévoit déjà que ce secteur connaîtra une croissance annuelle de 41 % au cours des trois prochaines années. Et la DSP2 pourrait accélérer cette croissance en Europe. Pour les anciennes compagnies d’assurance qui n’investissent pas dans les Assurtechs, cela signifierait une perte de leur part de marché.

Les clients profiteraient également de la DSP2, car les produits d’assurance pourraient devenir moins chers, en raison de deux facteurs principaux. La DSP2 créera un bon environnement pour les outils de gestion des finances personnelles, qui permettra à leurs utilisateurs de comparer facilement les offres d’assurance de différentes compagnies (Assurland.com). Cela rendra le marché plus compétitif et fera baisser les prix

Nouveaux acteurs – nouvelles exigences en matière d’assurance

Si la DSP2 offre de nouvelles opportunités aux diverses Fintechs et Assurtechs, elle introduit également de nouvelles exigences pour les acteurs qui souhaiteraient bénéficier de la dynamique Open Banking.

Il existe une exigence particulière qui concerne directement le secteur des assurances. Il s’agit de l’assurance obligatoire pour tous les AISP et les PISP qui opèreront dans le cadre de nouvelle DSP2.

Cette assurance est destinée à couvrir les risques spécifiques que les nouveaux acteurs prennent en ayant un accès direct au compte bancaire du client.

Quels sont ces risques spécifiques ?

Il existe, par exemple, des risques liés à la cybersécurité. Ils sont particulièrement élevés pour les entreprises ayant accès aux données de transactions de millions de clients.

Il existe également des risques liés aux transactions frauduleuses ou aux opérations liées au blanchiment d’argent. Ces risques sont également particulièrement élevés pour les entreprises qui traitent des millions de transactions chaque jour.

La DSP2 donnera un élan significatif au segment de l’assurance des entreprises Fintech. Avant la DSP2, il n’y avait pas d’exigences en matière d’assurance pour ces Fintechs. Par conséquent, le nombre de ces entreprises qui ont obtenu l’assurance appropriée devait être relativement faible.

Avec l’assurance obligatoire, tous les acteurs devront être équipés. Pour l’instant, il est compliqué pour les compagnies d’assurance d’évaluer correctement les risques, compte tenu d’un histoire de ces entreprises relativement récent. Par conséquent, au début, la tarification peut être relativement fluctuante et seuls quelques acteurs peuvent y être rentables.

Cependant, avec le temps, les compagnies d’assurance développeront une meilleure connaissance des risques auxquels elles sont confrontées. Par conséquent, de plus en plus d’entreprises pourront entrer dans ce segment et y être rentables.

Tout n’est pas si simple

Il est clair que la DSP2 apportera beaucoup de nouvelles opportunités pour les compagnies d’assurance. Cependant, tirer profit du nouvel environnement créé par la DSP2 pose certains défis.

L’un d’eux sera d’expliquer aux clients les avantages qu’ils peuvent obtenir en partageant leurs données de transaction avec un tiers, même si c’est un tiers de confiance.

Tout en expliquant ces avantages, il faudra communiquer de manière transparente sur les types de données partagées et la manière dont elles seront utilisées.

Cependant, le seul fait d’obtenir ce type de données ne suffira pas. Le traitement de ces données est une autre étape clé pour en tirer le meilleur parti. L’entreprise devra disposer de l’infrastructure adéquate, du talent et de l’expertise nécessaires pour traiter ces données de la manière la plus efficace possible. Et les compagnies d’assurance, qui ont déjà beaucoup investi dans le domaine du Big Data, devraient pouvoir le faire avec succès.