La recherche de relais de croissance dans les pays émergents constitue l’un des leviers privilégiés des assureurs à dimension internationale.

Henri de Castries, PDG du Groupe AXA, le rappelait d’ailleurs lors d’une réunion destinée aux investisseurs : « Depuis 2007, le groupe a cédé plus de 8 milliards d’actifs dans les marchés matures pour réinvestir plus de 6 milliards dans les marchés émergents ».

Le déplacement du centre de gravité de l’assureur français, du vieux contient vers l’Asie-Pacifique, ainsi que la volonté de grands acteurs du secteur d’orienter leurs investissements vers les pays émergents s’expliquent principalement par deux facteurs.

 

Deux facteurs principaux pour comprendre l’orientation des assureurs vers les pays émergents 

  • La dégradation des conditions de marché dans les pays mâtures :

La dégradation des conditions de marché dans les pays développés, notamment dans le secteur de l’assurance-vie, a ralenti la croissance du marché de l’assurance. En dehors d’Axa, Generali et Allianz, l’ensemble des acteurs a vu son chiffre d’affaires stagner ou reculer en 2012.

A contrario, les pays émergents ont affiché des taux de croissance à deux chiffres. À titre d’exemple, AXA a réalisé un chiffre d’affaires de 2,9 milliards d’euros dans ces pays en 2012, soit une progression de 12%, à périmètre constant, par rapport aux chiffres de 2011.

  • Des fondamentaux démographiques et sociologiquesprometteurs :

Ce n’est pas seulement le dynamisme actuel du marché qui encourage les leaders mondiaux de l’assurance à s’installer dans les pays émergents mais surtout les perspectives d’avenir qu’ils représentent. Trois caractéristiques permettent de prendre conscience de l’importance présente et à venir de ces marchés pour le secteur de l’assurance :

–       l’émergence d’une classe moyenne urbanisée de plus en plus nombreuse et désireuse de s’assurer pour améliorer sa protection sociale,

–       l’importance de la population conjuguée au faible niveau d’équipement en produits d’assurance,

–       la croissance du taux d’épargne et de la souscription d’assurance vie.

 

Des modalités d’entrée dans les pays émergents très diverses

En effet, les modalités d’entrée dépendent des contraintes légales ainsi qu’à l’environnement économique local.

Ces différentes options sont présentées ci-dessous :

  • Le partenariat bancassurance classique :

Il est possible d’opter pour un partenariat avec un acteur local. Ces contrats sont basés sur une durée de 10 à 15 ans et permettent la distribution de produits d’assurance par le biais du réseau bancaire.

L’assureur britannique Prudential est ainsi entré sur le marché thaïlandais via un partenariat conclu en novembre 2012 avec une banque locale, la Thanachart Bank PCL. Il profite ainsi de la taille du marché de l’assurance-vie dans le pays et du faible taux de pénétration du service (2,7%).  

  • La joint-venture ou co-entreprise :

La création d’une joint-venture avec un acteur local reconnu est une des possibilités qui s’offrent aux assureurs. Cette option est très souvent adoptée dans les pays où cela facilite l’obtention de licences d’assurance accordées par l’État.

À ce titre, le Groupe Aviva s’est allié avec Astra International, groupe coté le plus important en Indonésie, pour fonder Astra AvivaLife (assurance-vie). La joint-venture sera chargée de la vente de produits d’assurance-vie dans ce pays par le biais d’un certain nombre de filiales d’Astra International.

  • L’acquisition d’un acteur du marché

L’acquisition d’un acteur bien implanté sur le marché local peut constituer une stratégie intéressante afin de disposer d’un réseau de distribution et d’une clientèle déjà présents. Cela garantit également une totale indépendance dans les choix stratégiques adoptés, ce qui n’est pas le cas lors d’un accord de distribution ou de co-entreprises.

CNP Assurance, acteur majeur en France mais peu présent à l’international, a de fait choisi d’acquérir le 17 janvier 2014 Tempo Dental ; l’un des principaux acteurs du marché de l’assurance de frais de soins dentaires du Brésil, appartenant au groupe Tempo Participações. Cela permettra à l’entreprise Caixa Seguros, filiale de CNP Assurance dans le pays, de compléter son offre de produits dans le secteur de l’assurance santé.

 

Mais l’implantation des leaders dans les pays en développement rencontre certaines barrières

Tout d’abord, les grandes compagnies d’assurance sont souvent des entreprises publiques rendant leur acquisition impossible. Quant aux compagnies privées, leur valorisation prohibitive ou leur taille trop importante complexifient une prise de contrôle étrangère.

De plus, les acteurs locaux ayant déjà des infrastructures sur place, les synergies pouvant être dégagées lors de l’acquisition d’un concurrent sont plus importantes que celles dégagées par les compagnies d’assurances étrangères, favorisant ainsi les opérations locales.

Enfin, les exigences liées à Solvency II limitent la dette des assureurs et donc leurs capacités d’investissement. Certains, comme Groupama, ont même fait le choix de se désengager de l’international, afin de remplir les conditions de fonds propres imposées.

Lors d’une étude réalisée par Mergermarket auprès de 255 dirigeants de groupe d’assurance en Europe, Moyen-Orient et Afrique (EMEA), 77 % d’entre eux disent anticiper une accélération des opérations de M&A dans le secteur au cours des trois prochaines années. La concurrence pour le gain de parts de marché dans les pays émergents promet donc d’être rude…